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vendredi 13 décembre 2013

Réveillez-vous!

Est-ce une coïncidence? De temps en temps je lis dans le journal ou j'entends à la radio que de jeunes entrepreneurs ou ingénieurs français ont remporté des succès internationaux dans des domaines nouveaux ou que certaines de nos écoles, pas nécessairement les plus huppées, savent former des ingénieurs qui sont aussi des managers, qui savent prendre en compte les aspects écologiques et aussi sociaux de leur activité. Quelle bouffée d'air frais! Nous avons été si longtemps manipulés et endormis par les discours sur la décroissance nécessaire. Incroyable discours dans un pays à croissance zéro qui a déjà perdu la moitié de son industrie et a été dépassé par l'Italie, pays dont il est de bon ton de déplorer la paralysie.Cessons de confondre deux discours  qui se réfèrent l'un et l'autre à l'écologie, mais dans des termes complètement opposés. Je dis oui à l'écologie qui défend l'environnement, qui se bat pour un développement durable et contre ce qui menace notre existence. Je dis non au refus de la modernité qui frappe ceux qui travaillent et accroît encore les avantages des rentiers, des privilégiés, des mieux protégés. Dans nos sociétés affaiblies par la crise du capitalisme industriel, débordé et affaibli par la spéculation, seule la connaissance et ses applications nous fournit un nouveau moteur de croissance. Mais à condition que nous comprenions que la mise en oeuvre de nouvelles connaissances nous oblige à transformer  nos formes de contrôle et de gestion, à étendre le champ de nos informations et même -oh! mot dangereux- de nos précautions. Nous devons faire dans tous les domaines ce que Amartya Sen a fait dans le sien: remplacer des données quantitatives très grossières par une connaissance des situations réelles et en premier lieu des inégalités réelles, de l'accès réel différent des diverses catégories sociales aux principales ressources: alimentation, logement, santé, éducation, influence, décisions politiques etc. Nous avons tellement pris de retard avec de faux problèmes, des idéologies surannées, des mots d'ordre dont le sens actuel contredit celui qu'ils avaient il  y a un siècle, que nous avons besoin d'exemples concrets de ce que nous pouvons faire, d'idées nouvelles, et surtout de volonté d'agir et de confiance dans notre capacité de faire et de réussir. Nous avons tous pris trop de somnifères. Réveillons-nous tous, et surtout ceux d'entre nous qui avons déjà le plus travaillé.

lundi 9 décembre 2013

"Viva Madiba"

Peut- être  le  XX1ème siècle pleure -t il déjà, dès sa deuxième décennie, le plus grand de ses enfants, de même  peut-etre que, dès l'année de sa naissance, il a connu deux événements qui pourraient n'être dépassés par aucun autre pendant les cent  an qui les suivront: la chute du mur de Berlin et la manifestation de Tian anmen.
 Celui que lui-même et ses proches appelaient Madiba a mis au dessus de tout, pendant toute sa vie, la lutte contre une forme extrême d'inégalité, l'apartheid, Il n'a pas été un dirigeant nationaliste mais un homme au service de la dignité de tous les hommes. L'Angleterre et la France, qui ont tant apporté à la défense des Droits de l'Homme, ont envoyé leurs derniers  sauveurs ;Churchill et De Gaulle au panthéon de l'histoire. Mais Mandela, au dessus même de Gandhi, de Aung San Suu Kyi et de Martin Luther King, a engagé sa vie au service de ce qui est au dessus de la politique, au service de la dignité de chaque être humain. Plus personne, je l'espère, n'osera plus se moquer du "droits de l'hommisme", alors que c'est le plus grand et peut-être le seul mouvement social et politique capable de faire reculer les racismes, la xénophobie et que Mandela en est depuis cinquante ans la plus haute figure.
Ceux qui reprochent aux défenseurs des droits de l'homme de sacrifier l'efficacité politique à la pureté souvent trompeuse des prophètes et des utopistes ne peuvent que s'incliner devant Mandela qui n'a jamais séparée le juste du possible, l'absolu des circonstance. Il a eu le courage et l'habileté de prendre   le risque de négocier seul avec Botha, puis De Klerk, et de résister à la jeunesse de son parti qui voulait recourir aux armes.
Il refusa d'être un prophète; il voulut être l'humble serviteur de chacun de ceux et de celles qui forment le peuple et la nation.
J'approuve tous ceux qui se méfient des faclités de la subjectivité, car il ne faut jamais confondre celle ci avec la subjectivation, qui  est la prise en charge par un individu ou un groupe des exigences et des idéaux des droits humains universels.

Ce qu'est devenue l'ANC, à  partir du moment ou Mandela quitta volontairement le pouvoir,  démontre clairement qu'il était le seul capable d' accomplir une tâche qui supposait les sentiments les plus nobles, la réfléxetion la plus juste et le contrôle de soi le plus complet.
.    Nelson Mandela en prison

jeudi 5 décembre 2013

Les français contre la France


     Depuis plusieurs décennies, les français se distinguent des autres européens par les jugements pessimistes qu'ils portent sur leur pays et sur son avenir. Il serait absurde d'expliquer des mouvements dirigés ouvertement contre les impôts et contre le chômage par un mouvement de mauvaise humeur contre le président et le premier ministre, le gouvernement ou la majorité. 
        Mais il serait plus absurde encore de croire que ces mouvements n'ont que des causes économiques. Pour parler plus clairement,  il serait absurde de ne pas voir que les crises sociales, les mouvements de mécontentement ou les révolutions  portent en eux mêmes une cause plus générale : trop d'inégalités, .la lutte des classes , des scandales financiers, un manque de confiance
        Les mots employés aujourd'hui sont d'un type particulier : ce n'est pas de leur vie personnelle que se plaignent les français,  c'est de leur vie en tant que français, c’est de la manière dont la France est gouvernée. Le mécontentement est pus politique d'économique. C'est une affaire entre la France et les français. Ces mouvements sont plus politiques d'économiques;  leurs acteurs se définissent par leur territoire plutôt que par leur profession. C'est donc une affaire entre la France et les français. C'est presque une banalité de dire que la France a été un Etat  avant d'être une Nation et une société. La France de la Révolution se faisait appeler la "grande Nation"; celle d'aujourd'hui répète sans cesse  qu'elle est une et indivisible. Étrange définition, alors qu'elle est depuis longtemps un pays d'immigration et qu'on y  voit monter à la fois une identité islamique et, comme dans toute l' Europe, une islamophobie qui tend à se substituer à l'arabophobie d'origine coloniale. 
La France politique a beaucoup lutté contre les  "corps intermédiaires"; elle a même été en 1791 jusqu'à supprimer les universités, comme les autres corporations. Elle a été plus que méfiante à l'égard des langues et des cultures régionales et elle s'est plus d'une fois définie comme jacobine. C'est même ainsi que François Furet a expliqué la pénétration du parti communiste en France. On peut même ajouter que le gaullisme qui donnait  la priorité à l'Etat l'a longtemps emporté sur le  libéralisme introduit par Giscard  d'Estaing, comme le parti  communiste a dominé le parti socialiste de 1936 à 1983, c'est-à- dire pendant un demi-siècle, tandis que la CGT, liée au parti communiste, restait la centrale syndicale la plus importante, en particulier dans les grandes entreprises publiques.
Je n'en conclus pas que les français sont des libéraux ou des socio-démocrates malheureux de devoir se déguiser en communistes, en trotskistes ou en gaullistes; ce serait même, j'en suis convaincu, un lourd contre-sens.
La réalité est que la France est plus divisée que les autres pays entre eux,  le monde public et le monde privé, l'appel à  l'unité et les exigences d'une société très diversifiée et même très hétérogène, sans même prendre en considération ceux qu'on appelle d'un terme creux : les "Outre- mer". Le malheur le plus profond de la France est qu'elle réclame plus de diversité mais juge médiocre ou archaïque  tout ce qui affaiblit l'unité nationale.
 Elle condamne la concentration des pouvoirs et des ressources à Paris, tout en étant consciente que c'est Paris qui fait la grandeur de la France comme le  pensèrent Henri IV,  la Révolution et Napoléon.
Tant qu'on n’aura pas réconcilié la tête et les jambes, l'universalisme et la diversité culturelle, le pouvoir de la majorité et le respect des minorités, les français seront mécontents de la France car leur meilleure manière de défendre ou l'unité ou la diversité est de se convaincre que l'Etat fait le choix inverse des citoyens. 
Mais comment surmonter ces contradictions? Penser qu'elles sont insurmontables est accepter un déclin national, qui se transformerait vite en catastrophe. Ce qui est probablement vrai est qu'il est moins difficile de sortir de ces  contradictions quand un pays a confiance en ses institutions politiques.  Ce n'est pas le cas aujourd'hui; nous sommes en danger.

jeudi 28 novembre 2013

La social démocratie, c'est fini




Ce que nous vivons en France, en Italie, en Espagne, et aussi, sous d'autres formes, en Grande-Bretagne et en Allemagne, ce n'est pas une série de crises politique,c'est la décomposition, la fin de la social- démocratie. Et comme les communistes, trotskistes et autres maoïstes ne jouent plus qu'un rôle marginal,ont éclaté ou ont disparu,  c'est bien  toute la  gauche des sociétés industrielles qui achève de disparaître.…
La droite est moins menacée, puisque sa base principale, le monde de plus en plus internationalisé de l'argent, est bien vivant; mais l'argent ne conquiert pas par lui- même la majorité politique et les partis de droite, comme le gaullisme en France et la démocratie chrétienne en Italie ont disparu. L'Allemagne suit sa tendance centrale, celle de la grande coalition entre la démocratie chrétienne et une social-démocratie qui,à l'époque du chancelier Schröder, a pris des mesures plus de droite que de gauche.

Il faut avoir le courage de partir d'une constatation simple: il n'y a plus ni droite ni gauche; il n'y a plus que des centres et des extrêmes.  Beppe Grillo en Italie a même créé un parti anti-politique. Les enquêtes françaises montrent que les principaux partis ont déçu l'opinion publique et qu'il n'existe pas de nouveaux partis porteurs d'idées nouvelles. Le Front National n'est qu'un front de refus. La plupart des électeurs se contentent de rechercher le maintien d'avantages traditionnels .

L'Europe politique marche droit et d'un bon pas vers la confusion, le catastrophe et la violence.Il est impossible aujourd'hui d'imaginer une transition maîtrisée de l'ancienne société industrielle vers un nouveau type de société. et la mondialisation nous enlève même la certitude qu'une fois encore s'opposeront une droite et ne gauche, définies cette fois en termes mondiaux.
  Je parle calmement; pas de dictature en vue, sauf Poutine, qui est enfermé dans un pays vaincu dans tous les domaines. Mais une chute cumulant les effets de la crise et de la déception est toujours possible, menaçante, et la France est en même temps un des pays les plus fragiles. J M Ayrault, par une manoeuvre habile, vient de s'assurer de six mois de plus à Matignon; mais après,au milieu de 2014, après deux défaites électorales, comment passer sans accident grave d'Ayrault à Sarkozy, à Juppé ou à Valls?  
Beppe Grillo


jeudi 21 novembre 2013

Comment réveiller la politique endormie ?

La vie politique, qui repose sur les partis et, plus faiblement, sur les syndicats, est à bout de souffle; on ne l'entend plus.
Elle se réduit à organiser des campagnes électorales et à suivre l'action du gouvernement.
Elle fait partie de la vie politique; elle ne fait pas  partie de la vie démocratique Dans le pire des cas, elle n'est plus qu'une profession et des carrières.
Comment la ranimer, faire passer en elle les colères et les espoirs de l'opinion publique.?
Comment la faire réagir aux idées, aux informations, aux revendications?
Comment éclairer les "faits" transmis par les médias en connaissant mieux les enjeux du pouvoir?

La première réponse qui vient est que les O.N.G et toutes les associations peuvent jouer aujourd'hui,  dans un espace mondialisé, le  rôle  que les conflits , les grèves, les occupations d'usines ont joué  au coeur de la société industrielle .

 La réponse semble bonne , car l'action volontaire des O.N.G est connue de tous; certaines d'entre
elle ont même reçu le prix Nobel de la Paix .
Mais il ne faut pas longtemps pour se rendre compte que cette réponse, qui semble bonne, en fait ne l'est pas. Tout simplement parce que la solidarité et l'action humanitaire , si importantes qu'elles soient , ne sont pas des actions proprement, vraiment politiques.

L'action politique politique ne peut pas avoir d'autre but central que l'accès au pouvoir.
Avant tout, pour nous, par des moyens démocratiques, en premier lieu l'élection.
Et nous voyons dans le monde entier que ceux et celles qu'ont remporté de grands succès pour la liberté et l'égalité, pour les droits et la dignités, sont ceux qui ont le mieux uni dans leur pensé et leur action les cas les plus concrets et les principes les plus universels .
C'est avec des idées et des émotions, de la solidarité et de l'engagement qu'on peut faire revivre la vie politique, à la Mutualité comme sur la place Tahrir.
C'est clair : il faut que la politique sorte de chez elle, qu'elle soit présente là où le mal a été commis , qu'elle agisse ici et maintenant, au nom de principes immortels.
On s'occupe trop d'organisation et de programme; on ne s'occupe pas assez des crimes contre la démocratie; on n'entend pas assez les victimes et la voix de ceux qui veulent s'engager pour les défendre.








mercredi 13 novembre 2013

La guillotine est-elle dressée?


Nous nous posons tous, en silence  ou à voix basse la question que Laurent Joffrin vient de de se poser à haute voix dans son édito du Nouvel Obs et à laquelle il a répondu d'un voix glaçante dès son premier paragraphe, dont le titre en lettres rouges est: la guillotine dans lequel il est question de François Hollande et qui se termine par " le President y marche tout droit ".
Et on sait que Joffrin est un défenseur et un ami personnel de ce président.
Quelques jours plus tôt, dans un train qui nous emmenait  faire ensemble des conférences sur l'actualité, un ami me.  dit: Pour moi, le jour terrible sera celui où je lirai: Front national, premier parti de France et il donnait la date de ce choc, le jour des élections européennes
        Peut-être n'ai-je pas le courage de formuler des verdicts aussi sombres. Je suis conscient que la situation  ne peut pas durer. Le Président et le Premier Ministre sont impopulaires tandis que le Ministre de l'Intérieur est très populaire, parce qu'il mène une politique de sécurité publique qui plaît à la majorité de la population.
Et pourtant je continue à résister aux hypothèses les plus catastrophiques.  D'abord pourquoi l'opposition à laquelle se laissent entraîner les communistes? Mélanchon et les écologistes ne correspondent pas à une menace réelle sur l'extrême gauche. 
  En second lieu pour la partie de l'opinion la plus mal représentée,  le Centre, il a un appui considérable parmi les  grands intellectuels héritiers  Tocqueville. Par définition ces centristes sont aux antipodes du Front National. A vrai dire ils sont plus près de Juppé que de Sarkozy ou de Hollande. 
   Quant au Front National il manque de candidats et de personnalité. Je crois que beaucoup d'électeurs de la bonne droite préfèreront que ce soient les députés UMP qui négocient avec Marine.
  Enfin n'oublions pas que la seule élection décisive est l'élection présidentielle de 2OI7 qui entraîne dans son sillage l'élection parlementaire. La menace la plus réelle n'est donc ni la tahison de lextrême gauche, ni un putsch de l'extrême droite, mais une immobilisation croissante du Président de la Républiqe transformé, en ce début d'hiver en bonhomme de neige.

mercredi 6 novembre 2013

Bienvenue Bill de Blasio !

Enfin un instant de bonheur, de plein, d'éclatant bonheur: l'élection à la mairie de New York du démocrate Bill de Blasio,  qui porte en lui tant d'identités minoritaires:  italo-américain, marié à une afro-américaine, ancienne lesbienne, qui a  participé activement à toutes ses campagnes, et dont le fils, avec sa coiffure afro,  ramasse les voix des jeunes.
 Il a même poussé l'esprit de minorité jusqu'à soutenir Daniel Ortega, l'ancien dirigeant sandiniste,  dont la réputation s'est malheureusement dégradée depuis qu' il est parvenu au pouvoir à  Managua.
Ce qui fait resurgir devant nous les quelques 20 % de new-yorkais qui vivent dans la la pauvreté, parfois dans une indigence extrême . La ville des milliardaires et de tous  les" de plus en plus riches" est aussi le lieu où se croisent ceux  qui apportent de tous les coins du monde leur faim,  leurs espoirs,  leurs chants, les livres qu'ils écriront parfois et qui passent a côté des quartiers ou se sont fortifiées les minorités installées depuis longtemps, russes , juifs, porto-ricains et maintenant mexicains, colombiens et haïtiens.
Bienvenue Bill de Blasio,  vous qui avez échappé à la corruption qui avait paralysé les démocrates de New York,  aux gens bien installés,  qui cherchent à faire oublier leurs origines et qui êtes porté par ceux qui créent pour le monde entier les mots et les mélodies qui rendent supportable la pauvreté et le manque.
 

dimanche 27 octobre 2013

Du capital à la connaissance

Où est la crise le plus profonde? Et par conséquent où faut-il par priorité chercher une solution?

   J'ai déjà dit, comme tant d'autres, que la crise financière était dûe en premier lieu aux débordement d'un capitalisme financier qui préfère la spéculation à l'investissement. Ce que j'ajoute aujourd'hui est : prenons acte de cette trahison,  tout en cherchant à en limiter les effets. Et donnons priorité à la question capitale qui est ainsi posée: Existe-t-il  un autre moteur de la croissance qui puisse remplacer le capital, de plus en plus défaillant.
Et j'ajoute aussitôt: ne demandons pas à l'Etat de remplacer le capital privé,  car un Etat devenu tout puissant a montré assez dramatiquement ses vices en Union Soviétique  et en Chine pour qu'on le regrette pendant les siècles à venir.

Existe-t-il une autre réponse? Je ne prends pas plus au sérieux celle qui dit : supprimons la croissance. 
J'attends qu'on m'explique d'abord comment on crée de l'emploi sans croissance dans un pays à fort chômage et à faible durée du travail. 

Mais il existe une réponse qui est nouvelle et qui s'impose de plus en plus à nous: la connaissance.
Elle n'a pas été une réponse importante au début de notre modernisation quand la science était surtout mathématique et cosmologique et créait peu d'emplois, même quand elle faisait naître la médecine moderne avec les premières découvertes de la clinique.

Aujourd'hui la situation est tout autre et les Etats Unis, grand moteur de la science et de la technologie, se redressent après la crise financière, alors que l'Europe stagne et que, étrangement , l'Allemagne,  où les écologistes parlent haut,  relance des industries et des consommations qui polluent!

Une thèse qui recueille encore bien des suffrages est particulièrement inappropriée: cet appel au rôle économique  croissant de la connaissance aboutirait à subordonner la science  et la recherche  aux intérêts des entreprises, plus orientées par leur profit que vers les connaissances socialement utiles.
 Un livre tout récent, écrit par un ancien  vice-recteur de l'université de Montreal et qui s'appuie surtout sur des données américaines, répond efficacement à cette accusation qui ne se renouvelle pas. Les universités et centres de recherche  qu'il faut appeler d'excellence sont ceux qui prennent des brevets dans des domaines de la science fondamentale. En France des labos de biologie du C N R S créent des entreprises et prennent des brevets .
L'Institut Pasteur est une des plus belles réussites dans ce domaine. Et ne sommes nous pas convaincus  que la connaissance du cerveau , qui commence à peine à disposer de moyens importants, va bouleverser bien des aspets de notre vie? La santé , qui mobilise tout les connaisances , y compris en sciences sociales, n'est-elle pas déjà un des secteur les plus importants de notre activité économique,  ainsi que l'expression la plus concrète de l'action humanitaire ?
Ce qui ne veut pas dire que nos problèmes s'arrangeront tout seuls. La connaissance peut-être déléguée ou déshonorée ;  mais elle est avant tout, au même niveau que la défense des droits humains fondamentaux, l'expression de l'universalisme sur lequel reposent à a fois notre civilisation matérielle et nos libertés?

Le rôle  du capital  diminue; celui de la connaissance augmente; il est déjà le plus important. 




vendredi 18 octobre 2013

Lève toi et marche

Le Front National monte de plus en plus haut; il apparaît déjà comme le principal adversaire du gouvernement et il est vrai qu'on ne peut plus l'enfermer  dans des catégories dérisoires comme l'extrême droite, alors qu'il est très fort parmi les retraités, les ouvriers, les habitants des régions isolées...
  Et les analystes multiplient les explications de son succès: il répond au chômage et à la perte d'espoir; il dénonce l'impuissance des partis et des gouvernements; il appelle à la défense de l'identité nationale contre les immigrants.Mais ses discours, qui justifient son action, ne l'expliquent pas. Car ils n'ont aucune contre-partie positive; ils n'annoncent aucun projet, sauf la rupture avec l'Europe; ils ne sont portés par  aucune personnalité politique connue pour sa compétence économique, juridique ou internationale. Ce qui conduit à définir le Front National comme un parti anti-politique, comme les Cinque Stelle en Italie, définies aussi avant tout par un leader: Beppe Grillo, dont l'action de pur blocage a commencé à lasser les électeurs. Le Front National est fort du silence et de l'impuissance des partis de gouvernement et donc de la perte de confiance des électeurs dans les élus. C'est même ce qui le définit à son tour : il remplace l'action politique par la recherche de boucs émissaires; il appartient à la faiblesse de la vie politique, qu'il renforce par tous ses thèmes,  dont aucun n'a d'aspect positif,  ne propose de solution à un problème concret. Il ne faut pas le combattre en l'accusant d'être fasciste, ce qu'il n'est pas,  mais en proposant aux français des débats et des choix réels. Et surtout en les convainquant qu'ils ne sont pas impuissants et que leur redressement dépend avant tout de leur volonté et de leur capacité d'agir. C'est des partis plus que des gouvernements que dépend la renaissance de la confiance dans l'action politique. Le Parti Socialiste ,qui n'est plus depuis très longtemps un parti ouvrier, n'a pas su porter les nouvelles revendications culturelles, celles des femmes, comme celles de toutes les minorités, tout en sauvegardant l'esprit universaliste des Lumières. L'UMP est déchirée par la guerre des chefs et le Centre n'existe pas. Les mécontents, ne sachant plus pour qui voter, votent pour l'anti-parti, sans même savoir pourquoi.
   Autant le redressement économique ne peut être que lent au cours des deux ans qui viennent, autant les partis doivent reprendre la parole le plus vite et le plus vivement possible. Ce qui les met devant une perception critique d'eux mêmes et devant des transformations très visibles et profondes  de leurs objectifs et de leur analyse du monde contemporain. Ils doivent redevenir ou devenir des mouvements citoyens d'initiative politique, en lançant des campagnes,  en défendant des projets, au lieu de laisser aux médias le monopole de débats qui ne peuvent pas aboutir  à des initiatives proprement politiques. Il faut remplir le vide qui s'est créé entre les gouvernements et l'opinion. Il faut que renaisse l'esprit citoyen, qui n'a rien à voir avec les comités électoraux et les négociations entre états-majors.



mercredi 9 octobre 2013

Comment casser le laid?


L'autre soir, à la fin de l'émission de Frédéric Taddei,  j'ai entendu des réflexions  qui n'avaient pas été  annoncées sur le beau et surtout sur le laid. J'aime être cueilli par une telle surprise et demander à ma tête quelque chose à penser ou à dire sur ce thème importantissime mais si peu pensé.
 Bien sûr la beauté c'était l'ordre, comme le pensait Piero della Francesca,  quand il peignait sa Cité idéale. Et,  bien sûr aussi, elle ne peut plus l'être ainsi, idée que m'impose mon propre travail sur la fin du social et des sociétés. D'où l'envahissement par la laideur dans le désordre, l'absence de sens et d'orientation, par exemple dans les zones commerciales des sorties de ville ou dans les objets décoratifs qui rivalisent de laideur dans les appartements et les jardins. Je sais aussitôt de quel côté chercher une réponse, même s'il ne s'agit que d'un premier effort pour exposer ce grand thème à  mon chemin de pensée.
  Il faut que la laideur, le désordre agressif soient interrompus, brisés, vidés par une giclée de sens, de subjectivation, d'émotion, de désir ou de protestation. Comme par un corps nu, vivant, allongé sur un banc au milieu d'un carrefour encombré.

Cité idéale par Piero Della Francesca (15è), revu par JF Rauzier (20è)

samedi 5 octobre 2013

Un peu de bagarre donne des muscles

J'étais hier soir  chez Frédéric Taddéï sur France 2. Projeté, comme dans une course automobile, au milieu de pensées, de réactions, de modes d'expression de toutes les marques, de tous les tempéraments, de toutes les idéologies. J'en suis sorti tard, naturellement, donc un peu groggy et après deux ou trois heures de demi-sommeil, j'ai été envahi par tout ce qui avait été dit et à quoi je n'avais pas ou pas assez  bien répondu et c'est seulement au matin que j'ai réussi à remettre un peu d'ordre dans mes jugements et à mettre les arguments qui me génaient et en particulier l'idée que le conflit central dans notre société est celui des jeunes et des vieux, à portée de mon fusil. J'ai terminé la nuit encore un peu sur mes gardes mais tranquillisé; la baraque tient. Je sens la nécessité de ces tests de la solidité d'un matériel intellectuel 
ou de choix et d'émotions.
   Rien n'est plus différent de la réflexion continue, têtue ou illuminée que ces bagarres un peu incohérentes, que les coups reçus par surprise, comme dans les petites autos tamponneuses.Comme tout le monde, j'ai besoin de ces bagarres pour me protéger de trop de confiance en mes idées, alors qu'on n'a jamais tout à fait raison, pas plus que complètement tort.. Je voudrais que cette ouverture dure quelques années encore, le temps de bricoler encore deux ou trois livres pour élargir la brèche que j'ai voulu ouvrir et que j'ai peut-être ouverte en effet avec La fin des st avec La fin des sociétés. En tous cas en face ça résiste de tous les coés et j'ai envie de caillasser.
http://www.france2.fr/emissions/ce-soir-ou-jamais

mercredi 2 octobre 2013

En attendant les transhumanistes

La clé n'est pas sous le paillasson,  les idées ne sont pas des recettes. Entre une idée, une vraie, qui mord sur la réalité et une décision,une vraie, utile, prise par les producteurs, les contestataires, les consommateurs ou l'Etat, il y a place pour au moins quatre ou cinq intermédiaires et des mois ou des années d'efforts et de stratégie pour transformer l'analyse en action. C'est décevant, éprouvant; mais les sciences de la nature le savent depuis longtemps et pensent même que beaucoup de découvertes se font, sinon par hasard, du moins en cherchant autre chose.
 Dans le cas des connaissances sur l'homme et la société l'obstacle  plus difficile à franchir est la résistance des idées acquises; elle est plus grande que celle des intérêts acquis. Un mot usé ou endormi fait un trou dans la pensée. Nous croyons réfléchir et nous ne faisons qu'ânonner une leçon mal apprise et qu'il vaudrait mieux oublier. Il faudrait tout le temps inventer des mots nouveaux, mais c'est épuisant; en fait il est plus facile d'écrire un livre que de trouver un mot.
   J'aimerais penser que si je pouvais écrire encore trois ou quatre vrais livres- pas forcément gros- j'aurais trouvé assez de mots pour faire une ou deux phrases capables de faire sauter un dépôt d'idées mortes.
   Ce qui complique ma situation est que je ne suis pas près d'achever cette grande manoeuvre avant de fêter mon centenaire, ce que je ne suis pas certain d'arriver à faire. A quoi bon dépenser tant d'énergie? On se fait toujours avoir! Dépêchez vous les transhumanistes!

lundi 23 septembre 2013

Au coin de ma rue

Hier soir, je rentrais chez moi, vers dix heures. Sortant du métro, je marchais dans la rue où j'habite. Au dernier coin de rue, je vois un homme s'approcher de moi sur ma gauche. Quand il est plus près, il ouvre sa serviette, y  plonge la main et saisit un objet qu'il me tend; c'était mon nouveau livre. Nous rions tous les deux... Vous êtes bien Alain Touraine? L'année dernière, j'ai lu votre livre précédent; je l'avais bien aimé. Il était court mais il m'avait aidé à comprendre cette fameuse crise.
Ne vous inquiétez pas; celui-ci est plus long mais je crois franchement qu'il se lit assez facilement et il n'y est pas question que de crise.
Je vous avais reconnu parce que j'habite le même quartier et que je vous vois quelquefois faire vos courses.
Merci, bonne lecture. Si nous nous croisons à nouveau dites moi si vous avez aimé.

jeudi 19 septembre 2013

La plus grande erreur que nous puissions commettre serait. . .

de croire qu'il faut nous arrêter parce que nous avons trop longtemps marché, qu'il faut nous mettre à mi-temps ou à la retraite pendant que les autres, d'autres, bossent comme des brutes avant de se reposer à leur tour. N'est ce pas la solution la plus juste? Chacun travaille à son tour; pendant ce temps il emmerde le reste de la planète mais ensuite il se laisse passer sur le ventre par les nouveaux fordistes ou stakhanovistes, sans être trop inquiet, parce que le nombre de ceux qui travaillent seulement un peu  est beaucoup plus grand que celui de ceux qui se défoncent pour acheter de nouvelles machines inutiles et surtout pour le plaisir d'exploiter leur voisin. Ce calcul est faux de toute évidence; nous avons dominé le monde entier et maintenant le monde entier, y compris les Etats- Unis, se retourne contre nous et veut nous faire payer nos dettes avec de gros intérêts. A la fin du XXème siècle, tout le monde nous a détruits et méprisés. Les financiers ont ruiné nos industriels, les staliniens ont accusé les démocrates d'être des menteurs et ceux qui avaient libéré leur pays de la colonisation sont devenus des tyrans qui ont torturé leur peuple.  Qu'ils sont charmants les naïfs qui croient qu'en ralentissant un peu ils ne perdront presque rien et laisseront même un peu plus d'espace aux autres pour vivre comme nous. Ce que nous avons créé, de la science aux libertés, nous l'avons gagné pour nous et pour d'autres en nous éloignant de notre être, de notre identité, en découvrant des connaissances, en faisant respecter des lois, et par dessus tout en créant de l'universel là où il n'y avait que du particulier, de l'interdit et de la guerre?
 Pensez vous qu'il faille reculer, lâcher un peu de terrain, mélanger un peu de Lyssenko à du Darwin et un peu de Révolution culturelle chinoise à l'Habeas Corpus anglais?  L'arbitraire, l'identitaire, la violence relèvent la tête partout où le pouvoir est absolu, qu'il soit économique ou politique. Ce n'est pas de mollesse industrielle mais de courage et de lucidité que nous avons besoin pour défendre les libertés et l'égalité.

mardi 17 septembre 2013

Résumé : Dans un ouvrage dense et magistral, Alain Touraine ouvre une nouvelle ère sociologique et historique, celle de l'"après social". CYPRIEN AVENEL ET CHRISTOPHE FOUREL





Car le Sujet ne peut être mis au jour, identifié et déchiffré avec les méthodes empiriques d’une sociologie positiviste. Il est avant tout un "principe non social", un point de départ originaire se fondant et se créant lui-même, et non un point d’arrivée....
Le dernier ouvrage d’Alain Touraine, intitulé "la fin des sociétés", est présenté par l’éditeur comme "le couronnement théorique de (son) œuvre". C’en est un incontestablement, et dans tous les sens de cette expression. D’abord au sens architectural du terme, puisque cet ouvrage vient parfaire l’édifice d’une œuvre sociologique abondante et stimulante qui a permis à son auteur d’acquérir une véritable aura internationale, en particulier en Amérique Latine. C’est aussi un couronnement au sens de l’achèvement puisqu’en ré-abordant nombre de ses apports théoriques, l’ouvrage prend des allures testamentaires. C’est enfin un couronnement pour l’un des concepts-clés de l’œuvre du sociologue, c’est-à-dire "le Sujet". C’est en tout cas ce concept qui constitue le principal lègue que Touraine nous transmet et qui permettra encore de nombreuses analyses sociologiques à sa suite....

sur le site: www.nonfiction.fr
http://www.nonfiction.fr/article-6696-p1-de_la_crise_economique_au_monde_post_social.htm

Mon livre "La fin des sociétés" aux éditions du Seuil en librairie


L'article de Robert Maggiori dans Libé au sujet de mon  nouveau livre  "La fin des sociétés" est maintenant accessible à tous sur le site du quotidien. 

dimanche 15 septembre 2013

http://www.rfi.fr/emission/20130915-1-alain-touraine-fin-societes
http://www.franceculture.fr/emission-une-fois-pour-toutes-alain-touraine-2013-09-14


jeudi 12 septembre 2013

Je vis une expérience troublante.




J’ai  l’impression que mon ouvrage,  La Fin des sociétés, qui sort dans quelques jours aux  éditions du Seuil est mon premier livre. Les autres, tous les autres, furent des travaux préparatoires. Et le livre nouveau en annonce beaucoup d’autres mais que je n’écrirai pas parce que la mort m’en  empêchera.  Quelle drôle d’idée d’ailleurs de commencer à publier à 88 ans, et surtout après avoir écrit plus de quarante livres qui ont déjà fait l’objet de plus de 200 traductions, plus de vingt doctorats honoris causa, une élection dans de nombreuses académies ( Europe, Etats-Unis, Brésil, Mexique, Espagne, Chili, Argentine, Pologne etc…
Je ne savais pas moi-même que ce livre publié en 2013 serait pour moi le point d’arrivée et, j’oserais presque dire, de découverte d’une longue période de préparation qui a occupé en fait  soixante cinq années de mon activité.
Je lance un appel dans tous les continents pour que s’écrivent les livres qui devraient venir après celui qui paraît maintenant, rédigés par des auteurs nouveaux ou renouvelés. Je souhaiterais qu’ils les écrivent à la manière des Cultures et des Histoires dans lesquelles ils ont appris à penser et à écrire. 
Quant à moi, j’ai dédié mon livre unifiant plus qu’unique à mon épouse chilienne, Adriana,  tuée par le cancer, il y a vingt-trois ans déjà et à Simonetta, ma compagne italienne, rencontrée plus tard et dont la disparition récente et brutale m’a jeté dans ce travail que je croyais trop lourd. Elles ont toutes les deux partagé ma vie pendant les deux tiers de siècle de travaux préparatoires... 
Ce sont mes enfants, Marisol et Philippe et quelques amis dont Michel Wieviorka, Manuel Castillo, François Dubet, Manuel Antonio Garreton , Fernando Henrique Cardoso, Philippe Bataille, Jacques Le Goff, Serge Moscovici et aussi Carmen CastilloDjemila Khelfa, Denis Sulmont, Geoffrey Players  et enfin Michel Rocard – le seul dirigeant politique auquel je me sois identifié en France – qui m’aideront à marcher le plus loin possible.  

mercredi 11 septembre 2013

En Egypte, l’Histoire impossible




Il y a plus de deux ans, les égyptiens après les tunisiens, se réunissaient en masse sur leurs plus grandes places pour exiger le droit d’écrire leur propre histoire. La place Tahrir était leur Bastille.
Ce n’étaient pas les pauvres, ceux qui n’avaient ni instruction ni métier qui manifestaient ; les plus nombreux, les plus exigeants, étaient ceux qui avaient atteint un niveau d’éducation au dessus de la moyenne et qui communiquaient par Twitter
Cette demande d’histoire et de liberté que nous avions si souvent entendue au XIXème siècle dans nos rues et sur nos barricades, n’a pas pu s’ouvrir un chemin vers le pouvoir. La route lui était barrée non par des forces sociales mais par des pouvoirs politiques : l’armée et les Frères Musulmans, par le sabre et le goupillon, disait-on en terre chrétienne. Ce nouveau Tiers-Etat est condamné au chômage et à l’émigration.
L’Histoire, sur tous les continents, est en retard sur elle-même. C’est vrai aussi en France et en Italie, au Brésil et au Mexique, en Syrie et en Iran. Les puissants du XXème siècle ont imposé les idées du XIXème à la jeunesse du XXIème, réduite à manifester son indignation.
Mais ce n’est que le début du début d’un soulèvement qui occupera la scène mondiale pendant tout le siècle qui vient à peine de commencer vraiment. 
En attendant que les peuples débandent les polices, les médias sont occupés par les people qui font sauter les bouchons de champagne pour couvrir le bruit des balles.

                                                         La place Tahrir 

lundi 9 septembre 2013

L’illusion islamiste





Je ne crois pas à l’avenir des politiques inspirées par la religion. Certes, je constate que l’échec du nationalisme à la Nasser a fait avancer l’Islam sur le devant de la scène, même en Palestine, et c’est Khomeiny, L’Ayatollah, qui a occupé en Iran la place centrale qui avait été occupée par Mossadegh et le parti Toudeh (communiste).
Les dirigeants laïcs qu’étaient les dictateurs venus du Baath, en Irak et même en Syrie ont dû mettre des sourates du Coran dans leurs discours. C’est au nom d’Allah et de son prophète que sont lancés des attentats suicidaires alors que le livre sacré condamne explicitement le suicide. 
Comme si seule la religion était assez forte pour faire reculer l’Amérique et ses alliés, comme le font les Talibans qui ont déjà chassé les soviétiques d’Afghanistan.  Et dans le Sahara malien, l’A.Q.M.I est plus forte que les Touaregs. Mais une politique ne peut pas se limiter au rejet d’un adversaire, surtout lointain ; elle se condamne, quand elle le fait, à imposer au peuple un nouveau dictateur. C’est ce que nous avons déjà vu en Iran où le pouvoir d’Ahmadinejad a vidé les mosquées et déjà,  à Istanbul,  la jeunesse gronde contre l’islamisme d’Erdogan,  de plus en plus radical et personnel à la fois. 
Après le Liban, la Syrie démontre en accumulant les morts que les luttes entre « communautés » conduisent vite à la guerre civile et à la destruction de la nation.
Il n’y a pas de mouvement de libération réel sans contenu institutionnel, social et politique positif, sans volonté de libération et de libertés. L’Islam gardera longtemps dans de nombreux pays une influence qui ressemblera de plus en plus à celle du Christianisme aux Etats-Unis ou au Mexique, qui n’est pas contradictoire avec des politiques libérées de l’emprise du clergé.
                                    L’Ayatollah Khomeiny 

samedi 7 septembre 2013

Un saut périlleux dans la pensée sociale

Le renversement nécessaire et qui s'opère de toutes manières, qu'on le veuille ou non, consiste à remplacer à la place centrale, dans la pensée et dans l'action, le système social, la société, l'Etat, le capitalisme, l'entreprise, les organisations et les institutions par les acteurs qui ne deviennent sociaux que quand les individu se font porter par le sujet, c'est a dire par la conscience de leurs droits qui doivent être reconnus comme supérieurs aux loi elles-même.

    Ces mots ne sont pas légers comme des idées générales ; ils sont lourds de toutes les poussées, de toutes les colères, de tous les espèces, qui ont fait avancer le monde, des religions, des mouvements sociaux, des guerres d'indépendance des soulèvements pour la liberté et l'égalité, au nom de la solidarité et des droit des femmes ou de tous ceux qui sont dépendants, dominés, qui ne sont pas reconnus dans leur dignité d'êtres humains, qui sont enfermés dans leur "race" dans leur langue , dans leur territoire, qui sont privés de la flamme de l'universel, étouffés dans leur identité.

Tel est le sujet principal de mon livre La Fin des sociétés  que font paraître dans quelques jours les Editions du Seuil et qui n'a pas réussi à couvrir moins de 650 pages.

mercredi 4 septembre 2013

Les droits universels seule arme efficace contre les totalitarismes


    Nous consommons chaque jour un relativisme culturel paresseux qui consiste à décrire chaque culture comme si elle ne se définissait que par ses différences. Autant il faut rejeter - mais c'est déjà fait - l'inacceptable identification de l'occident à la culture et à la Civilisation, autant on ne peut pas éliminer par simple oubli le souci culturel d'universalisme des grandes cultures historiques ou, dans une perspective différente, la recherche de lois générales comme l'a fait Claude Levi-Strauss. 
Mais je préfère, pour défendre  mon attachement à l'universalisme qui ne vient pas que des Lumières européennes, un argument plus historique. Le XXème siècle a été dominé par les Totalitarismes auxquels on ne peut résister au nom d'une identité, manipulable ou contraire par ces régimes, mais au nom des droits universels des êtres humains dont quelques petits maîtres se moquent en ne déshonorant qu'eux-mêmes. 
L'argent se veut "global"; les dictateurs se veulent maîtres absolus de leur pays et de leurs conquêtes. Il faut les armes lourdes de la liberté et de l'égalité pour résister. Partout . Toujours.

mardi 20 août 2013

Jacques Vergès, avocat des révolutionnaires et des dictateurs

L'avocat Jacques Vergès vient de mourir. La majorité des réactions provoquées par sa disparition lui sont favorables: il a été au bout de ses idées , dit-on, il a refusé les compromis. Vrai, en effet. Partisan de la défense-rupture, c'est à dire du renversement de la défense de l'accusé en accusation du tribunal et du pouvoir de l'Etat qu'il sert. Technique intelligente et sans risque, puisque Carlos et Barbie étaient sûrs de ne pas avoir de circonstances atténuantes. Jacques Vergès fut un anticolonialiste absolu, sans limites, entraîné par sa passion, par un coup de foudre, dit-il, dans la cause du FLN et surtout de Djamila Bouhired qu'il épousa après son procès. Les français, comme  tous les autres, auraient dù condamner la guerre qu'ils ont menée contre 'Indépendance algérienne et le recours massif à la torture
Je crois avoir le droit de parler ainsi, parce que j'ai été opposé à toutes les guerres coloniales, mais à condition de ne pas m'en tenir là, parce que Pol Pot, dont Vergès fut l'ami,comme  Kieu Samphân, dont il fut le défenseur ne furent pas les libérateurs des cambodgiens mais les auteurs de l''assassinat d'une grande partie de la population,  surtout de ceux qui avaient été éduqués. Je condamne ce que signifie le colonialisme, mais plus violemment encore ce que signifie le génocide.
Personne ne peut affirmer aujourd'hui, comme le firent les républicains français du XIXème siècle qu'une révolution est un tout. Non,  Marx n'est pas responsable des crimes de Staline et il n'y eut pas de continuité du Serment du 2O Juin I789 à la Grande Terreur. Je n'éprouve aucune indulgence pour ceux, en particulier intellectuels et dirigeants politiques qui ont mené une longue vie tranquille en répétant des mensonges et en condamnant des innocents.
Je veux bien qu'on canonise  Jacques Vergès et qu'on lui ouvre le Paradis où il rencontrera Torquemada, mais je ne veux pas qu'on fasse de lui un héros des libérations!  Ceux qu'il a défendu après la guerre d'Algérie ont été des serviteurs de la violence et de l'arbitraire et non pas des défenseurs de la liberté.

lundi 19 août 2013

Rien n'est plus difficile que sortir du silence...



Rien n'est plus difficile que sortir du silence, de l'immobilité, du sentiment d'impuissance. Et pourtant nous savons que notre histoire a été pleine de bruit et de fureur
Somme-nous donc devenus incapables de prolonger une histoire  qui ne peut pas être  racontée qu'en chinois ou en coréen?
Mais n'est-il pas insultant pour les japonais , les russes, les brésiliens de dire qu'ils n'ont pas eu d'histoire en dehors de nous!
Et je n'ai aucun doute sur le rôle que avons déjà et nous aurons de plus en plus à  jouer: le contraire d'imposer notre vantardise à des colonisés. La défende des droits universels contre tous les tyrans  qui cherchent à imposer un pouvoir absolu et quant il faut déboulonner. Ce qui demandera du temps ( quand on pense que se promènent en Espagne des Franco à cheval!) Il faut   inviter la poudre magique  qui fait éclater les monuments de dirigeants assassins.     

mardi 6 août 2013

Des lumières dans le brouillard





Je  me suis peut-être engagé en évoquant ce qui m'avait donné de la lumière dans une nuit plutôt sombre. 
Je ne suis pas certain d'oser nommer les lumières qui m'ont permis de m'orienter.

  Je passe à l'aveu:  moi qui ai été anti-clérical et anti-religieux, la distance au social des principes éthiques, véhiculés par le christianisme, m'a été indispensable, sans jamais m'attirer vers les croyances religieuses. Je n'ai pas assez confiance dans les lois pour ne pas rester attaché à des droits qui sont au dessus d'elles.

La deuxième lumière qui m'a constamment éclairé est d'avoir vécu le plus souvent encore avec ceux et celles qui portaient les plus fortes protestations .

Et la troisième est celle que m'ont apportée pendant tout ma vie des étudiants venus de tout les continents. Je suis heureux d'avoir toujours rencontré dans mon séminaire une majorité de non -français, parmi lesquels, à leur tour,  les latino-américain n'étaient qu'une minorité. 
Comment pourrait-ont vivre longtemps sans bouger, sans changer, pour se rapprocher de soi-même ?
  

lundi 29 juillet 2013

Le poids des mots




       Je dois confesser que je sens mon être,  tel qu'il a été façonné par l'éducation, mes milieux, mes expériences de vie, en retard sur ma pensée, mes convictions. J'ai parfois l'impression de tirer avec moi une partie de moi-même dans un gros paquet mal ficelé. Je sais ce que j'ai mis dans ce paquet, la plus grande partie de ma vie scolaire, sauf  les cours d'histoire et de littérature française ; la plus grande partie des informations qu'on recevait de la presse écrite et de la radio dites françaises - BBC mise à part -  qui nous roulaient et nous endormaient dans une farine qui nous détournait  d'agir ; et l'interminable idéologie post-marxiste mais sans référence au mouvement ouvrier doublement réduit au silence par les Occupants et le Komintern.

       Je me demande encore comment j'ai pu traîner une si lourde charge. C'est tellement vrai que je ferais mieux de me demander d'où j'ai tiré en moi ou hors de moi la force d'avancer dans une direction opposée à celles où m'entraînaient les poids lourds que j'avais enfermés dans le lourd bagage qui risquait à chaque instant de m'entraîner.

vendredi 26 juillet 2013

Prendre un nouveau départ




Je pensais qu'en vieillissant j'aurais de moins en moins envie de réfléchir sérieusement et pour de longues  périodes, sans quand même m'imaginer dormant devant la TV !

    Mais ce qui m'arrive me surprend. J'ai l'impression que ce gros livre que je vais publier en septembre marque enfin un point de départ possible. Je crois que je pourrais me donner un programme de cinquante ans! D


Ce que je ne veux pas, c'est perdre une grande partie de ce temps à me préparer à disparaître. 
Comment pourrai-je mettre du sens dans le non-être, dans l'être mort ?
La sagesse de ma part serait de présenter mon gros livre à un public plus large et à moi-même sous forme d'un livre bref, d'explication de mes intentions principales. J'essaierai plus encore d’être capable de transformer l'exposé de ma pensée en conseils de gouvernement, sans me prendre pour le percepteur du futur président des français, qui n'y prêterait aucune attention. Mais il serait important pour moi d'être utile à mon pays, qui est si près de se laisser aller sur la pente douce qui se transforme vite en chute libre  

vendredi 19 juillet 2013

L'historien et le sociologue

Ce serait une grande erreur de croire que seuls les philosophes pensent et analysent les faits historiques  dont les historiens ne feraient qu'établir le récit et que les sociologiques ne verraient que du point de vue des besoins de la société, et même d'une manière plus limitée encore par les résultats de l'analyse économique
En réalité chacune de ces perspectives,  de ces lectures des faits,  apporte un mode de pensée et de comprendre différent des autres. L'explication dans les sciences sociales reçoit sa force avant tout de la convergence, de l'accord de plusieurs types d'analyse. La sociologie, en particulier a besoin de s'appuyer sur le travail parallèle, différent mais aussi convergent,  des historiens qui emploient d'autres mots et ont d'autres sensibilités, en particulier  d'autres relations au présent. Nous devons tous chercher de telles correspondances- plutôt que des complémentarités- entre diverses approches. Car il s'agit d'étudier, à la fois d'analyser et de comprendre,  des faits humains et sociaux qui ont une réalité objective mais aussi une signification subjective pour les acteurs eux-mêmes. Cette orientation est essentielle pour moi parce que c'est une de mes idées de base que la logique du système et celle des acteurs sont fondamentalement différentes. Diverses logiques s'encastrent les unes dans les autres, se combattent ou se complètent.
Je suis rappelé à ce pluralisme par la lecture attentive du livre que l'historien Christophe Prochasson vient de consacrer au grand historien François Furet, qui fut un de mes amis proches. Les mots les plus importants du langage de Furet ont été: la "passion révolutionnaire" et aussi "l'idée révolutionnaire" sans les séparer nettement et, de manière plus surprenante,le "passé d'une illusion", titre de son dernier grand livre , qui renverse celui de la derniére oeuvre de Freud, publiée après sa mort:L'avenir d'une illusion.
L'esprit révolutionnaire repose , selon lui, sur l'illusion  du recouvrement parfait de la nécessité objective de l'évolution et de la volonté de libération de la classe dominée et exploitée. Jugement qu'on peut en effet porter aussi sur la religion qui soumet l'homme à la volonté divine mais lui permet aussi ,avec la foi et l'aide de la grâce divine, de transformer le monde. Les notions de l'historien peuvent apparaître confuses au philosophe,  mais elles sont fortes de leur proximité avec l'expérience humaine,  vécue et rêvée. C'est pourquoi elles sont si utiles au sociologue qui a un pied du côté des philosophes et l'autre du côté des historiens, sans jamais mettre tout le poids de son esprit d'un seul côté.

jeudi 18 juillet 2013

Portrait intellectuel de l'auteur

Après avoir publié sur ce blog tout nouveau une dizaine de textes brefs mais qui en indiquent déjà l'orientation générale,  je sens la nécessité de prendre la parole un peu plus longuement, pour me présenter. Pas à coup de photos, au moins cette première fois, mais en définissant le plus clairement possible mon projet intellectuel. Je sens parfois que je laisse flotter un trop de flou autour de lui, comme si j'avais peur de m'enfermer dans une idéologie, mais en fait je me sens ferme dans ma marche et je sens l'urgence de m'expliquer clairement.
  Mon point de départ est autant historique que sociologique, car je tiens à ma double orientation.  C'est mon refus des visions de l'histoire, qui m'ont, comme presque nous tous, attiré au début de ma vie, bien que je n'aie jamais été communiste. Car les philosophies de l'histoire qui voient celle-ci comme un système en mouvement, porté par ses lois "naturelles, risquent toujours d'écraser la liberté humaine sous les déterminismes , culturels aussi bien qu'économiques, au point de nous faire basculer dans des régimes totalitaires, fondés sur une vision culturelle dans le cas du nazisme et économique mais aussi volontariste dans le cas du léninisme qui n'a pas la solide base philosophique du marxisme.
La principale expression historique des philosophes de l'histoire a été l'idée révolutionnaire qui fit apparaître la prise de l'Etat par la force comme l'expression conjointe de la nécessité historique et de la volonté populaire  renversant les obstacles dressés par les maîtres des institutions. J'ai toujours voulu reconnaître la priorité des mouvements sociaux sur les politiques révolutionnaires et je n'ai jamais voulu considérer la Révolution française comme un bloc, opposant au contraire l'oeuvre libératrice de la Constituante à la Terreur de la Convention montagnarde. Je sens encore en France la puissance de l'idée révolutionnaire, mais tout me démontre qu'elle ne correspond plus à aucune politique possible et tout mon travail intellectuel a été consacré à donner des fondements à une pensée et à une action fondamentalement démocratiques, en opposition complète avec la pensée que François Furet appelle à juste titre l'"illusion" révolutionnaire.
 Ce qui me sépare nettement du réformisme politique qu'on appelle aujourd'hui tocquevillien, pour ne pas évoquer des figures beaucoup plus conservatrices comme Guizot, c'est que je refuse de donner la priorité à l'action politique sur l'action et les mouvements sociaux. Dans les mouvements et les "printemps" qui éclairent le monde actuel je ne vois pas une confiance absolue dans les institutions démocratiques- les élections se retournant souvent contre les mouvements de libération- mais une volonté passionnée d'éliminer les régimes autoritaires et d'abord les dictateurs eux-mêmes. J'aimerais parler d'une "passion de soi", passion de soi comme sujet et donc comme acteur, qu'on ne peut pas confondre avec le narcissisme ou avec la volonté de puissance nietzschéenne.Cette conscience, si forte dans les sociétés "modernes", est l'"humanisation" de l'appel à l'idée d'un créateur ou d'un roi sacré ou de l'histoire comme créatrice de sens  pendant ce que Hobsbawm a appelé le siècle des révolutions. Vision de la modernité que j'oppose fortement à sa définition par la sécularisation, qui plaît tant aux défenseurs du libéralisme économique et politique. Seule cette passion du sujet est capable d'endiguer les populismes autoritaires qui débordent si facilement les institutions démocratiques.
C'est ici que je débouche directement sur une pensée politique du présent.Plus s'étend l'empire des pouvoirs, aussi bien du capitalisme que des régimes communistes et des nationalismes autoritaires, et plus la seule force de résistance  qui peut l'emporter sur eux doit déborder la défense de droits particuliers, qu'ils soient politiques, sociaux ou culturels et devenir un mouvement général, démocratique, car le seul fondement solide de la démocratie est l'affirmation des droits universels et fondamentaux de tous les êtres humains, ceux qu'on appelle les droits de l'homme, en n'acceptant plus que des ex-révolutionnaires se moquent cyniquement du "droits de l'hommisme" qui montre au contraire partout sa puissance libératrice.
Alors que la pensée du19ème siècle a été dominée par l'idée d'un accord final entre l'homme et la nature, à travers les victoires de l'homo faber, je pense,  de manière inverse, que le sujet humain s'affirme de plus en plus dans sa liberté et sa responsabilité, contre tous les déterminismes et contre tous les autoritarismes, comme construction d'un monde d'égalité et de solidarité, d'un monde où l'affirmation du sujet et de ses droits étend de plus en plus, dans le monde entier et dans tous les domaines de l'expérience humaine la capacité des êtres humains d'être les acteurs de leur existence et de leur histoire.
Cette rupture du système et des acteurs dont au contraire la complementarité était la pierre angulaire de la sociologie classique, en particulier chez Talcott Parsons et ses élèves, est l'affirmation sur laquelle je m'engage avec le plus de force.. Je me définissais au début de mon travail comme sociologue de l'action;  je préfère aujourd'hui me dire sociologue du sujet et des acteurs. C'est pourquoi je peux parler d'ère post-sociale et post-historique. Ce qui est très loin des pensées prudentes de la pensée politique qui me semble recueillir l'héritage intellectuel des social-démocraties européennes, au moment où cclles-ci sont partout épuisées.